Un courant faussement humaniste prêche la tolérance [1] comme une vertu, là où il devrait plutôt enseigner l’ouverture d’esprit...

Laissez-moi vous raconter une petite histoire...
Un scientifique était réputé pour son intolérance, et était fier de ce que ses collègues considéraient comme sa plus grande vertu, et ses détracteurs comme son plus grand défaut.

Ce même scientifique était intolérant jusque dans l’usage du terme d’intolérance, renvoyant ses détracteurs à l’étymologie latine, “l’indulgence pour ce que l’on ne peut empêcher”, du verbe « tolerare » qui signifie supporter.

Là où toutes les opinions se valent (par exemple les questions de goût sur une peinture ou une musique) il n’y a pas de tolérance, il y a la reconnaissance et l’acceptation de la valeur de l’opinion de l’autre, et celui qui refuse cette pluralité est simplement obtus.
Mais dès que vous parlez de tolérance vous induisez qu’il y a une erreur et une vérité ; quand vous me traitez d’intolérant vous me flattez, mais si vous voulez que je corrige mon intransigeance dans un domaine ambivalent où il n’y a ni vérité, ni erreur, et où toutes les opinions se valent, alors critiquez mon étroitesse d’esprit... et soyez intolérant, afin que je corrige mon erreur d’appréciation
.”

En bon scientifique, il visait le zéro défaut (comme un idéal à viser, tout en sachant que la perfection n’est pas de ce monde) et réduisait constamment ses marges de tolérance.
En bon pédagogue, il croyait aux capacités de progrès et de perfectionnement de l’être humain et considérait comme un devoir de montrer à ses élèves leurs erreurs, réduisant ainsi constamment leurs propres marges de tolérance.
Il acceptait qu’on préférât Mozart ou Tchaikovsky, alors que lui préférait les Rolling Stones ou Pink Floyd et détestait la musique classique.
Mais il ne tolérait pas qu’on crût que le Soleil tournait autour de la Terre ou que la somme des carrés des côtés d’un triangle était égale au cube de l’hypoténuse...

Dans un monde, aujourd’hui, où le terme a été dévoyé de son sens, il est difficile de se montrer intolérant, et même, lorsqu’il y a une erreur à corriger pour que l’autre puisse partager la vérité, le terme d’intolérance peut souvent décourager les intentions les plus altruistes...

Pourtant, même si cela semble difficile à réaliser, dans mon agenda, j’ai noté « J’ai le courage d’être intolérant ! »...

P.-S.

  • Photo entête : « Open Your Mind » de kaosalive.

Notes

[1] La tolérance est une marge d’erreur acceptable...
Pour les instruments de mesure, elle se définit même précisément, « une tolérance de 5% » par exemple, qui est l’écart que l’on a décidé d’accepter par rapport à une norme de précision ou à un étalon reconnu.